Jean Tardieu
(1903-1995)
à Saint-Germain-de-Joux (Ain) en janvier 1903
Décédé le 27 janvier 1995
« J'ouvrais par intervalles la porte de ce grenier, mon Théâtre de chambre.
Je percevais des fragments dispersés d'une comédie, les bribes incohérentes d'un drame.
J'entendais quelques rires, des éclats de voi, quelques répliques furtivement échangées,
et je voyais apparaître sous le rayon du projecteur quelques êtres ridicules ou aimables, touchants ou terribles,
qui semblaient échappés d'une aventure plus ample et s'en venaient à moi
comme s'ils avaient reçu mission de m'intriguer ou de m'inquiéter,
en ne m'apportant de ce monde pressenti que de lointains échos.
Je notais ces fragments, j'accueillais ces fantômes de passage, je leur offrais un minimum de logement et de nourriture, mais je ne me souciais pas de fouiller plus avant dans leur passé ou leur avenir,
ni de savoir si ces apparitions fugitives avaient de plus profondes attaches dans l'atelier des ombres. »
Jean Tardieu
La Comédie du langage
Notes de la Préface
- Faire en sorte que les corps racontent l’histoire autant que les voix ;
- Atmosphère train-train, quotidien rompu par des « coups de théâtre » ;
- Articulation-concentration-précision et décontraction des gestes.
Les personnages ne sont pas des fous mais des malades du vocabulaire.
Extraits de la Postface
Le langage, devenu musique, révèle alors un autre aspect des choses, ouvre la porte d’un autre univers, cocasse, délicieux, surprenant, où tout le monde paraît se comprendre malgré la valse insensée des mots.
[…] les mots excèdent le sens, font image et musique, et demeurent les moyens toujours inattendus d’un plaisir poétique. Essentiellement porté par les regards, les gestes et les intonations, le sens du texte soumet à rude épreuve les ressources du théâtre.
