Une heure dix-huit minutes

(2010)

de Elena Grémina (1956- & Mikail Ougarov


extrait de Une heure et dix-huit minutes

Sergueï Magnitski est mort le 16 novembre 2009 dans des circonstances suspectes dans une prison russe. Il s’est trouvé en prison pour avoir enquêté sur une immense affaire d’escroquerie ayant permis à des fonctionnaires du Trésor public et de la police de détourner 230 millions de dollars des caisses de l’Etat russe. Magnitski a bien fait son travail et l’a payé de sa vie. Celles et ceux qu’il accusait ont utilisé la machine de la « justice » russe, qui n’a de justice que le nom, pour le jeter en prison et s’assurer qu’il n’en sorte pas.
Pendant 358 jours dans les prisons à Moscou, Sergueï Magnitski a écrit 450 plaintes dénonçant les conditions de détention. Sa santé se dégradait rapidement. Dans de telles conditions, le service médical ne lui accordait pas de soins nécessaires – ce qui était aussi un outil puissant pour mettre la pression sur un détenu. Mais Sergueï restait fidèle à ses convictions et lors d’un procès, quatre jours avant sa mort, il a même persévéré dans ses accusations contre les « fonctionnaires mafieux ».

Des extraits de la pièce comportent les témoignages de Sergueï et des déclarations qu’on peut imaginer si on interroge les travailleurs dans les prisons russes. Exemples : un juge ne se considère pas comme un être humain, mais comme un outil dans le système, une femme qui travaille comme médecin dans la prison et qui est sûre que les détenus sont coupables avant que le procès ait lieu !

L’affaire Magnitski met en lumière une multitude de cas similaires qui se produisent chaque année en Russie et qui montrent le niveau affolant de corruption au cœur du régime. A ce jour, aucune personne parmi celles qui ont détourné ces fonds, accusé, emprisonné puis torturé Magnitsky n’a été arrêtée. Au contraire, ils sont nombreux à avoir été promus à des postes plus importants.
Bill Browder (ex-employeur de Sergueï Magnitski) et Zoïa Svetova (journaliste de « The New Times », spécialiste dans le domaine des droits de l’homme en Russie) ont parlé de l’impossibilité de trouver la justice en Russie pour des cas comme celui de Sergueï Magnitski. Selon eux, c’est maintenant aux hommes politiques français et européens de relever la question sur la possibilité des lois comme « Magnitsky Act » signé par le président américain en décembre dernier. Bill Browder a insisté sur l’importance de faire adopter une telle loi en France où on peut supposer trouver beaucoup de fonds et d’immobilier appartenant aux fonctionnaires russes. Zoïa Svetova a souligné que des centaines, voire des milliers, de procès inéquitables comme celui de Magnitski se déroulent chaque année en Russie, comme les enquêtes lancées récemment par le parquet contre plusieurs opposants.