André Benedetto

(1934-

né à Marseille

André Benedetto commence sa carrière come instituteur à Marignane et à Port-Saint-louis-du-Rhône. En 1961, il fonde la Nouvelle compagnie d'Avignon avec Jacqueline, sa femme, et Bertrand Hurault. Ils s'installent au Théâtre des Carmes en 1963. Parallèlement à des textes de Beckett, Arrabal, Jarry, Claudel (treize spectacles entre 1961 et 1966), la Nouvelle compagniecrée les pièces de Benedetto : Le Pilote d'Hiroshima (1963), Les Voyous (1965). En 1966, "involontairement", Benedetto crée le festival off d'Avignon. Durant le festival, il propose en effet un spectacle hors programmation officielle : Statues. Une revue, Soirées, accompagne à partir de 1965 les créations et permet la publication des pièces où des tetes théoriques et politiques de Benedetto. L'essentiel de son oeuvre théâtrale (comme le recueil au titre évocateur d'Urgent crier) sera publié jusqu'en 1976 par l'éditeur militant Pierre-Jean Oswald.

Au mois de mai 1968, André Benedetto : « Quand l’imagination prend le pouvoir, les pouvoirs traditionnels de l’imagination s’étiolent. […] Il n’existe pas de pièce, de spectacle qui puisse répondre au désir des hommes neuf qui sont en train de naître, de renaître et de se retrouver. Car enfin quel jeu, quel drame, pourrait produire sur un public l’exaltation qu’il ressent à écouter ne serait-ce que les communiqués qui lui apprennent d’heure en heure les progrès et l’ampleur du mouvement populaire actuel ? Quelle épopée peut-elle mieux que celle qu’il vit en ce moment le secouer de fond en comble ? Et quel affrontement fictif égalera jamais celui dans lequel il est impliqué totalement depuis plusieurs jours ? Et si l’on voulait ne s’en tenir qu’à un théâtre d’analyse, qu’à un théâtre politique très rationnel et très logique, quel dramaturge en ce moment serait capable d’expliquer mieux et plus clairement que l’action et la lutte elles-mêmes le sens de cette action et de cette lutte. Quelle œuvre enfin tiendrait debout et serait reçue en tant qu’œuvre par un public sensibilisé à l’extrême, sans être trahie à chaque instant et détournée de ses voies quand la moindre réplique, la plus banale, peut soudain éclater dans une salle avec des résonances imprévues ?
Aujourd’hui c’est la vie, minute par minute, qui est une création, qui est de l’art. C’est la vie qui se charge de divertir, de donner toutes les émotions. C’est la vie qui sort les gens de leur maison pour communiquer. C’est la vie qui enseigne mieux que n’importe qui. Et qui donne envie de vivre et de se battre. »

André Benedetto, « Bulletin de la nouvelle compagnie d’Avignon », 20 mai (1968),
reproduit in J.-J. Lebel, Procès du Festival d’Avignon. Supermarché de la culture, Pierre Belfond, coll. « J’accuse », Paris, p.55-56,
cité par Olivier Neveux in Théâtres en lutte. Le théâtre militant en France des années 1960 à aujourd’hui, Paris, éditions La Découverte, 2007, p.73.