Laurent Terzieff

(1935 - 2010)

né le 27 juin à Toulouse - mort le 2 juillet à Paris

D'une mère céramiste et d'un père sculpteur d'origine russe, Laurent Terzieff s'était consacré au théâtre après avoir vu, adolescent, La Sonate des spectres de Strinberg, mise en scène par Roger Blin, dont il sera le fils spirituel. Après avoir appris le métier "sur le tas" comme machiniste, souffleur, figurant, doublure, il débute en 1952, grâce à Jean-Marie Serreau, autre mentor, dans Tous contre tous d'Adamov. La beauté romantique de son visage émacié et de son regard clair auraient pu faire de lui un idéal jeune premier de cinéma, quand Marcel Carné le révèle à 23 ans dans Les Tricheurs, peu après son succès de télévision dans l'émission En votre âme et conscience. Bunuel, Clouzot, Godard, Pasolini lui confieront des rôles, mais Laurent Terzieff, épris d'absolu, ne cède pas aux sirènes de la starisation, et choisit le théâtre comme un sacerdoce. En 1961, il fonde la compagnie qui porte son nom, et qui sera hébergée dans les petits théâtres privés (Lutèce, La Bruyère, Lucernaire).

Là, il peut créer, loin des rumeurs et des engouements, les pièces inédites d'auteurs qu'il affectionne, comme Andréiev (La Pensée, 1961), Schisgal (Le Tigre et les dactylos, 1963), Albee (Zoo Story, 1965), et Mrozek (Tango, 1967), dont il créera plusieurs autres pièces dans les années 1970 et 1980.  Il monte également de nombreux spectacles de poésie autour de Rilke, Brecht et Milosz, puis Dernières lettres de Stalingrad (2001), un réquisitoire contre la guerre. Acteur au jeu hors mode et d'une très grande sensibilité, - il avait notamment triomphé dans Tête d'Or chez Barrault et reçu de nombreuses récompenses : prix Gérard Philipe en 1964, Grand prix national du théâtre en 1984, et plusieurs Molière, pour deux pièces qui ont été de vifs succès publics : Ce que voit Fox (1988) et Temps contre Temps (1993). En 2002, il avait perdu sa compagne et partenaire de théâtre, Pascale de Boysson. Quelques mois plus tard, il était remonté seul en scène pour Florilège, un spectacle poétique.

Indépendant, exigeant et discret, cet autodidacte du théâtre avait révélé des auteurs tels que Andreiev, Mrozek, Milosz et les anglo-saxons James Saunders, Murray Schisdal, Edward Albee. Lors de la 24e cérémonie des Molières, Laurent Terzieff, acteur incandescent au visage émacié, avait été sacré meilleur comédien pour son interprétation de L'Habilleur, de Ronald Harwood et de Philoctète, de Jean-Pierre Siméon. "J'ai toujours œuvré pour une mixité entre un certain théâtre privé et l'aide publique dont je dispose", a-t-il déclaré en recevant sa récompense, soulignant que "le théâtre ne se laisse pas enfermer dans des clivages et des étiquettes".



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